La question des luttes sociales et syndicales, et de leur remise en cause fait l’objet d’une grande attention. Il s’agit là d’une des composantes du détricotage des avancées en matière sociale et de conditions de travail. L’Observatoire belge des inégalités s’est penché sur les critiques émises à l’encontre des syndicats en cherchant à mettre en lumière l’origine, les effets et les formes qu’elles prennent aujourd’hui dans le discours populaire, médiatique et politique 1. L’heure n’est pas au défaitisme, mais à la réflexion sur des réponses possibles pour améliorer la perception sociale des syndicats. Éclairage.
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Prises d’otages, inefficacité, archaïsme, illégalité, irresponsabilité, conservatisme, coûts, opacité, corporatisme, irréalisme, dangerosité, violence... L’action syndicale et, plus largement, les mouvements sociaux sont régulièrement remis en cause dans le discours médiatique, politique, mais aussi par le biais de poursuites judiciaires.
Se pose d’emblée la question des différentes formes de critiques émises à l’encontre des syndicats ou de leurs modes d’action. En effet, des différences fondamentales existent entre une critique interne ou externe aux syndicats et au monde du travail, et des discours qui relèvent d’oppositions idéologiques à l’action organisée des travailleur·euse·s. Il est indispensable de développer une lecture politique et prenant en compte les rapports de classes et de force pour différencier les critiques qui cherchent à renforcer ou réorienter le mouvement syndical et celles qui visent à l’affaiblir et à en réduire l’influence. Pour mener cette analyse à bien, il est important de tenter de connaitre l’opinion publique vis-à-vis des syndicats. Cela permet de comprendre le contexte dans lequel se développent des discours et actions visant à limiter ou bloquer leur action. Dans ce cadre, il faut revenir sur le rôle des médias dans la diffusion de ces critiques. Il s’agit alors de proposer des pistes de réflexion quant aux réponses possibles.
Image des syndicats dans la population
Une étude du CRISP s’est penchée en 2016 sur la perception des syndicats et de leur action par la population 2. Les questions étaient regroupées en trois catégories : l’image des syndicats, l’avis sur les moyens de lutte mobilisés et les raisons de se syndiquer. L’enquête a été menée auprès de 2.000 personnes, francophones et néerlandophones, syndiquées ou non, et en différenciant les gens qui s’identifient à la « classe ouvrière ».
En ressortent plusieurs éléments. Tout d’abord, les trois quarts des sondé·e·s francophones et néerlandophones reconnaissent l’utilité des syndicats pour protéger les droits sociaux. Cette proximité entre francophones et néerlandophones, qui va à l’encontre de l’idée reçue que l’on aurait deux positionnements différents, ressort d’ailleurs tout au long de l’enquête. Pour autant, les centrales syndicales actuelles inspirent confiance à moins d’un tiers des sondé·e·s, une majorité d’entre eux·elles ne les jugeant pas suffisamment fortes pour contrer les multinationales ou pour prendre en charge les « problèmes de demain », sociaux ou environnementaux notamment.
En ce qui concerne les modes d’action, plus de deux tiers des sondé·e·s reconnaissent la nécessité du droit de grève, une même proportion considère que la justice ne peut s’y opposer et qu’il ne faut pas imposer de service minimum dans les services publics. Par contre, l’avis sur les pratiques de lutte diffère. Une majorité des sondé·e·s s’identifiant à la classe ouvrière et une plus grande proportion de francophones considèrent que les actions devraient être plus dures.
Du point de vue des raisons de se syndiquer, les services rendus par les syndicats sont la première raison invoquée. Ensuite vient le fait que les syndicats sont les mieux à même de protéger les travailleur·euse·s. A contrario apparait la disparition des « piliers ». Le fait d’être issu d’un milieu socialiste, catholique ou libéral n’est évoqué que par 25 % des sondé·e·s pour expliquer leur adhésion et cette proportion est encore plus faible chez les jeunes.
Finalement, de cette enquête, qui est la plus récente et la plus large à avoir été menée sur la question, ressort une reconnaissance de l’utilité des syndicats et de la légitimité de leurs modes d’action. Néanmoins, apparait aussi une faible confiance vis-à-vis de l’institution, y compris parmi les sondé·e·s syndiqué·e·s. En général, les réponses de ces dernier·ère·s se différencient très peu de celles du reste du panel, notamment sur des critiques fondamentales des syndicats, comme la judiciarisation de leurs actions, l’interdiction des grèves ou la plus grande liberté d’action du patronat. Ceci témoigne d’un nécessaire travail de formation interne aux syndicats pour contrer le discours critique dominant. Enfin se pose la question du durcissement des modes d’action et de l’investissement de nouveaux terrains de lutte sociaux et environnementaux.
Quelles sont les critiques et d’où viennent-elles ?
Dans ce contexte d’adhésion à l’institution syndicale, mais de méfiance vis-à-vis des structures se pose la question de l’origine et des formes de critiques et attaques à l’encontre des syndicats. Contrairement à un discours dépolitisé qui voudrait que l’action syndicale soit remise en cause globalement par « la société », il est important de rappeler la forte composante de classe et de lutte entre monde du capital et du travail 3. Ces critiques s’orientent en trois axes : symbolique, juridique et législatif.
Des attaques symboliques
Du point de vue symbolique, il s’agit de remettre en cause l’utilité et les moyens mobilisés, en faisant passer les revendications et méthodes comme étant opposées au « bien commun » et à la population. Dans ce domaine, les organisations patronales sont très actives. Elles dénoncent les conséquences des mouvements sociaux sur leurs activités et sur les revenus, ainsi que l’impossibilité de transformer plus avant le marché du travail. Les critiques visent principalement les grèves ou manifestations, alors que la « concertation sociale » est plus épargnée. Cette division entre concertation et rapport de force est pourtant toute théorique, l’un étant indispensable à l’autre dans le mode d’action actuel des syndicats. En outre, l’idée que la Belgique serait particulièrement touchée par les mouvements sociaux est contredite par les statistiques 4. Le nombre de jours de grève baisse depuis les années 1970. De plus, au niveau européen, il n’y a aucun lien entre le taux de syndicalisation et le nombre de grèves. La Belgique présente un taux de syndicalisation bien au-dessus de la moyenne européenne, mais connait un nombre de jours de grèves par travailleur·euse plus faible que cette même moyenne. Une critique liée est celle du coût des grèves, de la paralysie des activités et de la « prise en otage » des non-grévistes et des usager·ère·s. Il faut alors rappeler que la grève est le seul et ultime moyen pour les travailleur·euse·s de se soustraire à leur obligation de travailler, les patrons pouvant de leur côté réduire les salaires, fermer une entreprise ou licencier du personnel. En ce sens, la grève et les piquets s’opposent à l’obligation et non au droit de travailler. D’ailleurs, ceux·celles qui disent défendre le droit au travail en critiquant les grèves semblent moins sensibles aux 400.000 chômeur·euse·s en Belgique qui ne peuvent accéder à ce droit. Il·elle·s ne se mobilisent pas lors de licenciements. Il·elle·s ne sont pas non plus choqué·e·s lorsque, faute de financement, les services publics ne rendent plus les services attendus à leurs usager·ère·s. Il·elle·s oublient finalement que la plupart des conflits sociaux sont motivés par la défense de l’emploi.
Au niveau de la population, l’hostilité vis-à-vis des mouvements syndicaux est également inégalement répartie. La carte ci-contre et le graphique ci-dessus, basés sur un recensement des signataires de pétitions dénonçant les mouvements sociaux et les syndicats dans la partie francophone du pays au moment des grèves et manifestations de la fin de l’année 2014 montrent un lien statistique fort entre le standing des communes, c’est-à-dire leur capital socio-économique et culturel, et le taux de signataires.
C’est dans les espaces riches que l’opposition est la plus forte, alors qu’elle est sous-représentée dans les entités pauvres. Le taux de syndicalisation, et d’adhésion à leurs actions, est plus élevé chez les populations moins riches et salariées, alors qu’il est plus faible chez les cadres et les professions libérales.
Des attaques juridiques
Un autre axe d’action est juridique. Les dirigeants d’entreprises mobilisent de plus en plus souvent la justice. Pour justifier cette procédure d’exception, l’extrême urgence est invoquée : blocage d’une entreprise, d’un axe routier... Si elle est reconnue, le tribunal rend une décision le jour même ou le lendemain, sans consultation ni même information auprès des travailleur·euse·s et de leurs représentant·e·s. Ce n’est pas le droit de grève qui est jugé mais les abus qui auraient eu lieu. La marge d’interprétation est large et les décisions souvent défavorables aux travailleur·euse·s puisque leur position n’est pas entendue. Les jugements sont assortis d’astreintes. Pour contrer cette procédure d’exception devenue règle, il existe un recours, plus long, qui aboutit souvent lorsque le mouvement social a déjà été brisé. Ainsi, sans contester formellement le droit de grève, la judiciarisation le vide de sa substance.
Se pose alors aussi la question de la personnalité juridique. Les syndicats, comme les partis politiques, ont le statut d’organisation de fait, qui les exempte de publier la liste de leurs membres et la comptabilité issue de leurs cotisations. Ce statut protège les affilié·e·s qui peuvent garder secret leur engagement, limite l’utilisation de l’arme financière en cas de conflit social (les caisses syndicales sont utilisées pour indemniser les grévistes, connaitre leur montant permet d’évaluer le nombre de jours de grève finançable) et empêche la poursuite des syndicats en justice pour les actions de leurs affilié·e·s. Par contre, ce statut ne concerne pas l’intermédiation pour le versement du chômage, pour laquelle les syndicats rendent des comptes, sont juridiquement responsables et sont contrôlés régulièrement par l’ONEM. L’« irresponsabilité » juridique des syndicats est donc inhérente à leur fonctionnement, partielle et encadrée.
Sur le même thème, les syndicats sont soupçonnés d’être moins regardants quant au statut des chômeur·euse·s, facilitant les fraudes de leurs affilié·e·s. Signalons d’abord que le contrôle des chômeur·euse·s n’est pas du ressort des syndicats, ceux-ci doivent uniquement vérifier la complétude des dossiers administratifs. Dans ce cadre, l’ONEM, chargé de contrôler ce travail syndical, souligne sa bonne qualité, comparable à celui de la CAPAC 5.
Les attaques sur le plan légal
Une dernière possibilité de mettre en cause l’action syndicale est de changer les lois qui la régissent. Les relais politiques se trouvent principalement au niveau des partis de droite, y compris extrême. MR, N-VA, OpenVld et Vlaams Belang sont donc les plus actifs. Ainsi, le gouvernement fédéral précédent cherchait à remettre en cause l’action syndicale : création d’un service minimum dans les services publics, mise en place d’une personnalité juridique pour les syndicats, limitation des possibilités de piquets de grève... Néanmoins, ces critiques tendent à s’étendre aux partis sociaux-chrétiens, cdH et CD&V et sociaux-démocrates, PS et Sp.a. La distinction entre la droite, le centre et la gauche traditionnelle est donc ténue sur ces dossiers. C’est sans doute un élément majeur de réflexion, puisqu’en parallèle l’importance des « piliers » pour expliquer la syndicalisation s’estompe, ce qui pose la question du maintien ou non des relais politiques « traditionnels » des syndicats.
La critique des syndicats et de leur action émane donc de leurs adversaires idéologiques et économiques : détenteurs de capitaux et moyens de production ainsi que de la droite, conservatrice ou libérale. Ces clivages se reflètent dans la population, les plus riches étant plus négatifs que les moins nantis. Ces attaques, provenant de groupes sociaux forts et disposant de moyens d’action et de communication bien établis, se conjuguent, se complètent et se renforcent et participent à un climat très défavorable à l’action syndicale en Belgique.
Quel est le rôle des médias ?
L’analyse du relais médiatique donné aux critiques syndicales et plus largement du traitement des mouvements sociaux est importante pour comprendre la construction d’un sentiment d’opposition majoritaire aux syndicats. Un relevé de la presse audiovisuelle et papier a été mené pour traiter de cette question 6.
Quels que soient les supports, au niveau des articles et reportages d’analyse, un équilibre existe entre les prises de parole des syndicats et de leurs opposant·e·s. Par contre, une place surdimensionnée et non compensée est laissée aux éditorialistes, intellectuel·le·s et autres spécialistes, qui sont majoritairement opposé·e·s aux mouvements sociaux et dont la supposée neutralité est très rarement remise en cause, alors qu’il·elle·s proviennent souvent de classes sociales élevées. Par exemple, parmi les éditoriaux du Soir et de La Libre publiés entre la formation du gouvernement « Michel » en septembre 2014 et fin 2015, on dénombre 23 opinions négatives vis-à-vis des syndicats et de leurs actions pour six positives et six neutres. La même situation ressort des médias audiovisuels. Un relevé des invité·e·s principaux·ales sur la radio publique La Première pendant la même période démontre un fort déséquilibre entre syndicats et représentant·e·s patronaux·ales, puisque ces dernier·ère·s sont invité·e·s presque trois fois plus souvent tout au long de l’année.
Tableau
Nombre d’invités syndicaux et patronaux
Syndicat Patronat
Toutes émissions 16 44
Invité principal du matin 10 19
Invité principal du matin en période de conflit social * 7 6
* c’est-à-dire invité 7 jours avant ou après une grève ou une manifestation nationale.
Lorsqu’on analyse les moments où sont invité·e·s ces interlocuteur·rice·s sociaux·ales apparait un second déséquilibre : les représentant·e·s syndicaux·ales sont surtout audibles en période de conflit social, alors que les représentant·e·s patronaux·ales sont invité·e·s en toute période.
Ce déséquilibre a plusieurs conséquences :
Tout d’abord, le bruit de fond, entendu tout au long de l’année, est dominé par la parole patronale. On invite rarement un·e représentant·e syndical·e pour débattre/discuter de la situation sociale ou économique. Ensuite, en période de crise, alors qu’il·elle·s étaient jusque-là inaudibles pour expliquer les enjeux de fond, les représentant·e·s des travailleur·euse·s doivent expliquer ces manifestations/grèves et les nuisances associées et surmédiatisées.
Pour les représentant·e·s des travailleur·euse·s, outre l’enjeu du conflit social lui-même, se pose donc aussi la question de l’explication et la médiatisation compliquée de celui-ci, en raison de leur moins bon accès à l’antenne et au risque de n’y être invité·e·s que pour se justifier des « violences » et « nuisances » induites.
De plus, dans les articles d’actualité, les conséquences « spectaculaires » des conflits sont surmédiatisées : usager·ère·s bloqué·e·s, travailleur·euse·s empêché·e·s d’entrer, violences... Par contre, les revendications des travailleur·euse·s, moins visibles, passent au second plan. Enfin, l’analyse de l’opinion sur les mouvements sociaux est limitée à des micros-trottoirs ou des sondages peu représentatifs. Dans ce cadre, la précarisation du journalisme est sans doute un élément explicatif. Faute de temps et de moyens, les analyses de fond disparaissent, au profit de l’actualité immédiate. Les journalistes se conforment à ce qu’il·elle·s estiment attendu de leur hiérarchie et de leur « clientèle ». Sans possibilité d’analyser un sujet, les présupposés caricaturaux sont privilégiés. De même, les médias en compétition se suivent et se copient pour ne pas « rater de scoop ».
Par leur discours sur les syndicats et les luttes sociales, les médias témoignent donc d’une hostilité et d’une méconnaissance. En relayant majoritairement cette vision de la société, les médias participent à et aggravent un climat d’opposition aux syndicats et aux intérêts des travailleur·euse·s.
Quelles pistes de réponses ?
La critique des syndicats et leur remise en cause ne sont pas neutres socialement, ne tiennent pas la route face aux faits et sont un vecteur de hausse des inégalités sociales puisque le taux de syndicalisation est corrélé positivement avec de plus faibles inégalités de revenus, dans la société en général et dans les entreprises. Cette critique se base aussi sur le déséquilibre du discours médiatique. Pourtant, force est de constater que ce mouvement est efficace : même si de nombreuses victoires peuvent et doivent être revendiquées, l’action syndicale est affaiblie et rares sont les mouvements durs et durables dans le temps, même lorsque le rapport de force et l’opinion publique semblent favorables, comme lors de l’hiver 2014-2015, au cours duquel plusieurs grèves et manifestations nationales de grande ampleur ont eu lieu à la suite de la formation du gouvernement « Michel » et à l’annonce d’un programme de gouvernement très libéral 7. Des mouvements de revendications sociales qui se disent « a-politiques », « a-syndicaux » se développent, témoignant de la déconnexion avec ces derniers. Au sein des structures syndicales existe un découragement des militant·e·s, sympathisant·e·s et travailleur·euse·s qui se marque notamment par une baisse d’adhérent·e·s 8. Alors que les structures économiques sont de plus en plus divisées spatialement et du point de vue organisationnel, avec une multitude d’entreprises, de sous-traitants, de statuts mettant les travailleur·euse·s en concurrence, la solidarité dans les luttes est pourtant fondamentale.
Comment répondre à ces critiques ? Sur quelle base élargir la lutte ? Comment protéger les conquêtes sociales et valoriser les victoires ? Une piste consiste à renforcer une lecture de classe et, sur cette base, de nouer des alliances avec d’autres acteur·rice·s sur les terrains de lutte.
La repolitisation de l’action syndicale, de ses membres et plus largement des luttes sociales est sans doute au centre des enjeux. Un premier outil serait le renforcement des formations internes à destination des travailleur·euse·s, délégué·e·s et permanent·e·s. En parallèle, pour réduire la méfiance perçue vis-à-vis de l’institution, se pose la question d’intégrer la base militante dans les structures syndicales, de faire remonter leurs revendications ou de systématiser les assemblées générales. Les revendications devraient être pensées pour être compréhensibles y compris par des travailleur·euse·s non syndiqué·e·s, pour que tou·te·s puissent s’en emparer, en tenant compte du discours « dépolitisé » actuel. En lien se pose aussi l’enjeu du réinvestissement du terrain des idées, en mobilisant des médias alternatifs, en créant de nouveaux canaux de diffusion internes et externes, en investissant des terrains perdus ou peu fréquentés, par exemple l’enseignement professionnel où le patronat est souvent le seul intervenant issu du « monde du travail ».
« Au sein des structures syndicales existe un découragement des militant·e·s, sympathisant·e·s et travailleur·euse·s. »
Un enjeu lié est celui des structures. Dans un contexte de division forte des travailleur·euse·s, les syndicats devraient être construits pour créer et renforcer les solidarités. Qu’en est-il d’une organisation plus transversale, permettant des solidarités par filière, entre sous-traitants et industriels, entre fournisseurs et ouvrier·ère·s, entre entreprises privées et publiques, entre concurrents (y compris internationaux) ? Comment mettre en œuvre une organisation permettant des luttes communes sur les sites d’activités, entre les travailleur·euse·s issu·e·s de différents statuts, relevant de différentes entreprises et créer une solidarité à même de faire face à une économie où ces échanges intersectoriels sont de plus en plus importants ? Les travailleur·euse·s actif·ve·s dans les tâches « annexes » (logisticien·ne·s, services à la personne, nettoyage et gardiennage, sous-traitance industrielle...) ont une capacité de blocage fondamentale parfois négligée. Une révision des structures implique évidemment d’identifier des luttes communes, par filière, par site économique et intersectorielles.
Ceci participerait à (re)créer et élargir des combats communs dépassant les divisions de statut, secteur, géographique ou culturelles et visant à (re)politiser et participer à des luttes fondamentales sur l’environnement, la multiplication de statuts précaires hors salariat, les questions de genre ou de race et de créer de nouvelles solidarités. Il s’agirait aussi certainement de ne pas fuir les luttes politiques de fond, basées sur des agendas à moyen et long terme. Les victoires obtenues par les femmes de ménage, les Blouses blanches, les travailleur·euse·s de Ryanair, Bpost ou Aviapartner se basent toutes sur un rapport de force long et des actions « dures », de grèves reconductibles et de manifestations. #
Mathieu STRALE, Chercheur en géographie à l’Université libre de Bruxelles
1. Plusieurs articles sur le sujet ont été publiés par l’Observatoire des inégalités, et ses membres ont été invité·e·s à de nombreux séminaires et journées d’études organisés par les syndicats. Cet article propose une synthèse des différentes analyses menées précédemment sur le sujet.
2. http://www.crisp.be/2016/09/syndicats-et-syndicalisme-perceptions-et-opinions/
3. http://inegalites.be/Les-attaques-contre-l-action
4. http://inegalites.be/Trop-de-greves-tue-la-greve-Une
5. http://inegalites.be/Les-attaques-contre-l-action-168
6. http://inegalites.be/Qui-invite-t-on-a-la-radio
7. http://www.equipespopulaires.be/wp-content/uploads/2016/12/ctr1_2-15leger.pdf
8. 88.000 affiliés en moins entre 2014 et 2016 ; https://www.rtbf.be/info/belgique/detail_baisse-du-nombre-d-affiles-chez-les-syndicats-a-qui-la-faute?id=9940103
Crédit photo : Donatienne Coppieters - CSC