"Enfant chéri" des uns, "vilain coco" pour d'autres (du moins à ses débuts), la FOPES, la Faculté ouverte de politique économique et sociale, fêtera ce 20 novembre son quart de siècle. L'occasion de faire le bilan de vingt-cinq années dédiées à la formation des "acteurs de changement".


Vingt-cinq ans… le bel âge diront certains! Celui surtout où l'on peut commencer à poser un regard mûr sur le quart de siècle qui vient de s'écouler. La création, en 1974, de la FOPES s'est d'abord inscrite dans un mouvement qui visait à permettre à des adultes, qui n'avaient pas eu l'occasion de mener à bien des études supérieures, de parfaire la formation qu'ils souhaitaient, après en avoir perçu l'intérêt à l'occasion de leurs activités professionnelles ou de leur engagement. Une expérience qui devait se révéler doublement importante, d'abord pour le Mouvement ouvrier chrétien, puisqu'elle permettait aux travailleurs de participer à une formation liée à leur pratique professionnelle, syndicale et sociale, ensuite pour l'Université, l'UCL, puisqu'elle constituait une ouverture plus importante au monde du travail au travers du MOC, ouverture susceptible d'engendrer des remises en cause plus profondes. Une expérience qui se révèle encore aujourd'hui unique en Europe, voire au… monde! Même si d'aucuns objecteront qu'il n'y a pas beaucoup de mouvements ouvriers chrétiens de par le monde, ni d'universités catholiques de la Communauté Wallonie-Bruxelles, mais bon…

Vingt-cinq ans plus tard, l'objectif de la FOPES demeure le même: "… la formation universitaire d'agents de changement dans le domaine économique et social" (1), l'accent étant mis à la fois sur la qualité scientifique d'une formation pluridisciplinaire (économie, sociologie, philosophie et méthodologie notamment) et sur la capacité de développer des politiques économiques et sociales alternatives. Quant à l'offre de formation – une licence universitaire en trois ans –, elle n'a pas fondamentalement changé. Elle a cependant évolué par la prise en compte de thématiques propres à différents groupes de travailleurs étudiants, qu'il s'agisse de l'action collective, du travail social, de l'environnement, du développement régional et de l'action interculturelle, en centrant les cours à option et les ateliers sur ce type de problématiques. En 1990, la FOPES a également créé une section "Développement-Gestion de projets", appelée familièrement FOPES-Sud. Elle propose une licence en deux ans à des étudiants adultes d'Afrique francophone actifs dans des projets de développement dans leur pays et qui s’engagent à réinvestir dans leur pays et dans des projets de développement.

Militantisme

Depuis 1974, plus d'un millier d'étudiants sont sortis diplômés de la FOPES. Un public qui a changé de profil au fil des ans. “On est passé en 25 ans du militant lourd, impliqué jusqu'au cou dans son syndicat, son mouvement, à un militant à la prise de responsabilités sociales plus ciblées, à un engagement plus ‘contractuel’”, explique Georges Liénard, directeur de la FOPES. Une tendance confirmée par une étude interne (2). Selon cette étude, 83% des étudiants sont impliqués dans l'action collective – dont 23% sous forme d'activité professionnelle – au moment de leur entrée en formation. Septante-cinq pour cent des étudiants maintiennent leur engagement après avoir quitté la FOPES avec une augmentation importante de la fonction de dirigeant, de responsable et de sympathisant mais une diminution relative de celle de militant.
Si la FOPES s'adapte au changement, elle se veut aussi résistante à certaines mutations sociales. "La société est de plus en plus segmentée. On vit dans une logique de spécialisation, expose Georges Liénard. Nous ne nous inscrivons pas dans cette démarche. La formation FOPES tend au contraire à articuler des points de vue trop souvent cloisonnés dans la société. Nous pratiquons le croisement des savoirs aussi bien au niveau de l'interdisciplinarité entre les cours, que de la confrontation de la théorie avec l'expérience de terrain des étudiants. Cette spécificité de la FOPES la rend plus indispensable que jamais." Un pari possible grâce à la qualité du corps enseignant et des conseillers à la formation, notamment de la première génération des enseignants, en gardant l’idéal, les valeurs et les pratiques de ce qui a fait le succès et la philosophie de la FOPES durant ces 25 ans.
Catherine Morenville


(1) Faculté ouverte de politique économique et sociale. Brochure d'information, Louvain-la-Neuve, février 1998, p. 2.
(2) Cette enquête, coordonnée par notre collaboratrice Florence Degavre, paraît en ce mois de novembre 99. Les principaux résultats en seront présentés à l'occasion du colloque Acteurs pour une société en développement que la FOPES organise le 20 novembre prochain à Louvain-la-Neuve, à l'occasion de son 25e anniversaire