Bernard Arnault, la plus grosse fortune de France, le patron du luxe et du superflu, l’homme qui murmurait à l’oreille du président Sarkozy, Bernard Arnault donc veut devenir belge... tout en restant français. La nouvelle fit du bruit, début septembre, en France, où Libé titrait «Casse toi riche con!», comme en Belgique, où l’édito de La Libre affichait fièrement «Bienvenu M. Arnault». On a beaucoup commenté la Une de Libé, l’estimant tantôt excessive, tantôt vulgaire ou partisane. On s’offusqua moins des éditos successifs de La Libre, pourtant autrement indécents. A l’heure où le débat sur les naturalisations se crispe sous la pression d’une droite prête à empêcher les familles de se regrouper, il est choquant de se réjouir qu’un homme cumule les nationalités dans le seul but d’accumuler les milliards. Pour M. Arnault, la Belgique n’est qu’un moyen, alors que pour des milliers de migrants elle est l’aboutissement d’une pénible quête d’une vie digne. Cette demande est insultante. Loin de moi l’idée d’opposer le « mauvais riche » au « bon pauvre ». Mais comparer, comme le fit La Libre, ce milliardaire qui a abusé des subventions publiques et des fermetures d’usines pour construire son empire à des « des entrepreneurs – des hommes et des femmes qui prennent des risques et créent de l’emploi dans notre pays » est d’une malhonnêteté intellectuelle inquiétante. La même malhonnêteté qui anime celles et ceux qui depuis des décennies dénoncent la rage taxatoire qui frapperait les entrepreneurs belges. De ce point de vue, merci M. Arnault. Votre démarche démontre qu’au contraire la Belgique est un paradis fiscal pour grosses fortunes. Peut-être ferez-vous avancer le débat malgré vous... Dans ce cas, «Bienvenue, riche con» !