Le 7 mai dernier, la commission d’enquête de la Chambre sur les grands dossiers de fraude fiscale remettait son rapport final. Un rapport qui n’a sans doute pas eu la publicité qu’il méritait, en raison de l’ombre que lui a faite la commission d’enquête Fortis, dans le contexte de la crise financière. Dès l’introduction du rapport, les points sont mis sur les « i ». Frauder le fisc est un comportement asocial.

 La question de la fraude fiscale n’est pas qu’une question théorique : chaque euro soustrait à l’impôt se traduit par une pression fiscale accrue sur les autres contribuables. La fraude fiscale est donc un comportement totalement asocial. Peut-on évaluer ce que représente cette fraude en Belgique ? Le rapport de la commission d’enquête de la Chambre cite le professeur autrichien Friedrich Schneider (université de Linz) pour évaluer l’économie souterraine. Cette dernière représenterait, selon lui, pas moins de 21,5 % du produit intérieur brut (PIB), soit quelque... 60 milliards d’euros par an. Par définition, cette évaluation demeure approximative. L’étude s’appuie sur des chiffres qui ne sont pas toujours tout à fait exacts, mais sa conclusion rejoint grosso modo la plupart des autres estimations : la fraude au fisc résultant de cette économie souterraine serait d’environ 30 milliards d’euros par an. Un montant énorme. Rappelons, par comparaison, que le déficit budgétaire belge sera de 20 à 25 milliards d’euros en 2009.
Partant de l’expérience et de faits concrets, le rapport met l’accent sur trois affaires qui ont fait grand bruit, et dont des erreurs manifestes de gestion ont été mises à l’avant-plan. La première est la plus connue : c’est le dossier Beaulieu. L’affaire a été tellement tirée en longueur que la Cour européenne des droits de l’homme a décidé que le délai raisonnable pour des poursuites était dépassé, et que les auteurs ne pouvaient donc plus être poursuivis. La seconde est l’affaire des quotités forfaitaires d’impôt étranger (QFIE). En principe, rien d’illégal dans ce système qui devait permettre de déduire une partie de l’impôt à payer en Belgique sur la base de l’impôt à payer à l’étranger. Mais jusque dans quelle mesure ? Il n’y avait pas de montant déterminé parce que cela dépend des traités de double imposition. Au début des années 1990, des banques belges ont mis sur pied des mécanismes permettant, via l’Uruguay, la Corée du Sud et l’Italie, d’utiliser cette technique pour réduire à zéro la base imposable en Belgique. De tels montages étaient pour leur part punissables. Enfin, troisième dossier : celui des sociétés de liquidités. Le procédé consiste à vider les actifs d’entreprises florissantes.
Pendant près d’un an (à partir du 28 mai 2008), une série d’experts ont donc défilé devant la commission, ce qui a abouti à un rapport final de quelque 272 pages, sans compter les annexes. Il contient aussi une estimation documentée de toutes les procédures et analogies possibles dans les pays voisins et parfois plus lointains. Ainsi, si vous voulez tout savoir sur le secret bancaire en Ukraine, pas de problème : la réponse figure dans le rapport.

Contenu

Mais qu’en est-il du contenu ? Le rapport englobe un champ très vaste de questions très techniques. Point de départ : la lutte contre la fraude doit permettre une taxation juste. Il est évident que la fraude fiscale constitue une distorsion du marché et qu’elle désorganise l’économie : elle affaiblit la position concurrentielle et le pouvoir d’achat des entreprises et des particuliers belges qui se conforment à leurs obligations fiscales. En outre, la préservation de l’État-providence ne peut être assurée que si chacun y apporte sa contribution ; une contribution qui doit être répartie équitablement. Enfin, comme on le sait, les perspectives budgétaires de l’État sont extrêmement sombres (on parle aujourd’hui de 20 à 25 milliards de déficit). Ceci doit être compensé quelque part, or il existe un fort potentiel à exploiter dans la fraude.
La lutte contre la fraude sociale et la lutte contre la fraude fiscale doivent aller de pair. Le rapport fait sien un lien important : la fraude sociale n’est pas seulement une affaire de fraude aux allocations, comme les libéraux semblent l’affirmer. Les personnes qui ne déclarent pas tous leurs revenus sont également des fraudeurs « sociaux » ; non seulement parce qu’ils éludent l’impôt, mais aussi en raison des avantages sociaux (des bourses d’étude, par exemple) qu’ils perçoivent indûment, ou encore en raison des cotisations sociales qu’ils ne paient pas.
Enfin, parmi les nombreux sujets abordés au sein de la commission d’enquête, figure le manque de collaboration et d’échange d’informations entre le fisc et le parquet, et entre le fisc et l’ONSS. Dans de nombreux cas, on attend trop longtemps pour déposer une plainte effective auprès du parquet. La dispersion de l’enquête entre différentes administrations semble exercer un effet contre-productif.

Simplifier la législation

Les moyens nécessaires pour lutter efficacement contre la fraude ne pourront être mis en œuvre que si l’on s’emploie notamment à simplifier la législation en matière fiscale. Ainsi, le rapport indique à bon droit que des règles différentes en matière de prescription compliquent les poursuites plutôt que de les faciliter. Il est essentiel que les mesures les plus simples soient prises en premier lieu : si l’on harmonise et simplifie la procédure, il va de soi qu’il sera plus difficile de profiter d’erreurs de procédure et de concevoir des stratégies d’évasion fiscale. Une recommandation toute simple mais efficace. Il faut naturellement s’assurer que les délais restent suffisamment longs, afin de donner au fisc et au contribuable le temps de pouvoir faire valoir leurs droits.
Tous les dossiers de fraude fiscale doivent être traités de manière claire et équitable. Que cela se fasse au terme d’une procédure administrative ou judiciaire, ou par la conclusion d’un accord à l’amiable a certes son importance, mais peut être décidé sur la base de l’ampleur de l’infraction.
On relance ici le principe de l’una via. Qu’il s’agisse du pénal ou du civil : que la sanction se produise en une seule fois et que les procédures ne se paralysent pas mutuellement. La procédure a ses droits mais il faut éviter que les sanctions restent indépendantes et que le fraudeur s’en sorte toujours à bon compte. S’agissant de la gravité des sanctions, elles dépendent aussi de l’importance que la société accorde à ce problème. En outre, un contrôleur m’a confié que la politique de tolérance qui est de facto actuellement menée contribuait encore à affaiblir l’efficacité des contrôles. S’il faut en croire le rapport, cet homme a raison. Le rapport entend d’ailleurs donner également au ministre de la Justice un droit d’injonction ; tout comme, par exemple, dans les affaires pénales, il doit pouvoir demander au parquet d’enquêter sur des cas de fraude possibles. Cela devrait aussi contribuer à détecter plus activement les fraudeurs.
Actuellement, même un simple échange d’informations sur les fraudeurs potentiels est déjà problématique. Le rapport plaide pour que les pouvoirs d’enquête des différentes administrations fiscales soient harmonisés et modernisés. En outre, les bases de données des différents services (administrations, services de police, parquets…) doivent être connectées pour mettre en œuvre concrètement ces recommandations.
On peut éprouver une certaine aigreur à constater qu’on élabore un point d’action à partir d’affaires qui auraient dû être réglées il y a cinq ans déjà. En effet, la création d’une base pour le datamining et pour le « dossier unique » était déjà un élément clé de la note Jamar de 2003. L’utilisation maximale de l’échange électronique des données au sein des pouvoirs publics figurait déjà à l’époque en bonne place dans l’accord de gouvernement. Ces promesses n’ont-elles été que des mots ?

Renforcement des parquets

Pour améliorer le travail des parquets, il faut commencer par résoudre le problème du personnel. Ce qui implique de :
– prévoir la formation nécessaire pour les fonctionnaires concernés, pour leur permettre de maîtriser les techniques les plus récentes et de réagir de manière adéquate ;
– prévoir des possibilités de carrière pour des fonctionnaires fiscaux détachés auprès des parquets ; on doit offrir aux intéressés des perspectives de carrière qui leur permettent aussi de progresser en assumant de telles missions ;
– prévoir suffisamment de juristes et de référendaires pour assister le parquet et les juges d’instruction.
Il faut également mettre sur pied un parquet fiscal. La constitution d’un auditorat fiscal, exclusivement compétent pour poursuivre la fraude fiscale et financière pourrait ainsi regrouper les spécialistes. De cette manière, les dossiers fiscaux complexes ne seraient pas ensevelis sous la pile des autres dossiers. Si le fisc constate un dossier de fraude, il devrait le signaler immédiatement à l’auditorat fiscal, qui déciderait de le traiter soit selon la voie administrative, soit selon la voie pénale. Il en va de même pour les juges d’instruction. Ils doivent eux aussi pouvoir se spécialiser dans les questions fiscales et financières complexes.

Loi Franchimont et Charte du contribuable

La commission d’enquête est arrivée au constat que dans tous les dossiers examinés, les avocats des fraudeurs utilisent les possibilités qui leur sont offertes par la loi Franchimont pour compliquer la procédure et la tirer en longueur. Cette loi vise à protéger les intérêts des suspects et des victimes dans les affaires pénales en leur garantissant des procédures équitables. Mais le niveau de difficulté des dossiers de fraude fiscale offre à certains avocats la possibilité de recourir à des techniques permettant de faire traîner les affaires pénales pendant des années. Par ailleurs, la Charte du contribuable limite considérablement la collaboration entre le fisc et le parquet, ce qui cause parfois des obstacles involontaires à la poursuite de la fraude.
La loi Franchimont doit être réévaluée, notamment à la lumière de cette problématique, sans toutefois créer pour les délits fiscaux un régime différent ou une exception à la loi. La loi est sensée mais, tout comme pour la Charte du contribuable (qui date de 1984 !), on constate qu’à cause des astuces de certains fraudeurs, elle peut faire obstacle à des poursuites légitimes. Une évaluation de la loi et de la Charte s’avère donc nécessaire. Il faudra voir comment trouver un juste équilibre entre la protection de la vie privée et les soupçons de fraude, et ensuite comment améliorer la collaboration entre la justice et le fisc.

SPF Finances

Investir dans la formation et l’équipement des fonctionnaires qui combattent la fraude est en soi une bonne chose. Le rapport reconnaît ainsi le caractère inégal de la lutte du garde-chasse contre le braconnier. Mais qui contrôle le contrôleur ? On entend créer dans ce but un Comité F, comparable à celui qui existe déjà pour la police (le Comité P). Un tel organe permettrait au parlement de suivre en permanence les activités du fisc. Dans le passé, le contrôle du fonctionnement de l’administration fiscale, du moins dans le cadre de la détection et de la poursuite de la fraude fiscale, laissait à désirer. Certes, la création d’un organe supplémentaire et permanent de contrôle doit être considérée d’un œil critique : l’objectif ne peut en effet être de créer un organe qui surveille en permanence les contrôleurs ou qui établisse une ligne politique indépendamment des compétences du ministre des Finances. Il peut s’agir en revanche d’un organe chargé d’examiner les problèmes structurels que connaît la poursuite de la fraude. Dans cette perspective, un tel organe est plus que souhaitable.
Par ailleurs, le rapport souligne clairement les responsabilités du fraudeur. Les transactions importantes se réalisent rarement seules : il existe en général un réseau de personnes — notaires, fiscalistes, etc. — qui conseillent les intéressés et qui sont censés faire usage de leurs connaissances dans le respect de la loi. Collaborer à une fraude fiscale constitue dans leur chef un délit très grave. S’ils participent à la mise sur pied de montages destinés à favoriser la fraude, ils doivent être sévèrement sanctionnés, quelles que soient les modalités des poursuites.

Secret bancaire

Ce n’est pas une surprise : la commission sur la fraude constate que le secret bancaire représente un obstacle à une lutte efficace contre la fraude fiscale.
Il apparaît dès lors évident qu’il faut adapter la réglementation en vigueur en Belgique et permettre à l’administration d’interroger les banques en présence d’indices de l’existence d’une fraude. La commission de la Chambre se rallie donc au point de vue exprimé depuis toujours par la CSC notamment. Au vu des obligations européennes (directive sur l’épargne) et de la pression constante de certaines juridictions, on devait tôt ou tard en arriver à cette conclusion. Mais le ministre des Finances ne s’avoue pas encore vaincu. Lors d’un symposium de la banque d’investissement Puilaetco, M. Reynders a affirmé que le secret bancaire ne disparaîtrait pas mais subsisterait sous une version light. Voilà qui promet pour l’avenir.
La commission d’enquête a également voulu enfoncer le clou sur un autre point sensible. La lecture de son rapport — en particulier s’agissant des exemples concrets de grande fraude — confirme que prétendre que les grands fraudeurs parviennent souvent à s’en tirer sans mal n’a rien d’un euphémisme. C’est pourquoi la commission plaide instamment pour un règlement identique de toutes les dettes selon une procédure à l’amiable avec l’administration. Pour le dire simplement : il faut pouvoir arriver à un accord. Est-ce une bonne chose ? Sur le plan des principes, on est forcé de répondre par la négative. On peut difficilement admettre que le secrétaire d’État chargé de la coordination de la lutte contre la fraude fiscale fasse immédiatement sienne cette position. A-t-il pour autant complètement tort ? Pas tout à fait. On peut justifier la conclusion d’accords avec les fraudeurs lorsque tout, y compris les amendes, a été remboursé. Mais pas dans tous les cas. Et il ne peut être question que le fraudeur puisse acheter le droit d’initiative et le droit de décision de poursuites. De telles pratiques font penser au système censitaire ou, mieux encore, au tirage au sort des conscrits. Le pauvre est obligé d’accomplir son devoir de citoyen (en effectuant son service militaire jadis mais aussi en payant ses impôts). Mais si vous avez assez d’argent, vous pouvez échapper à de telles obligations !
Tout cela amène la commission à estimer qu’il faut mettre en place un système équilibré. Si un tel système est mis sur pied, on entend aussi exclure toutes les manières actuelles de « régler » ses obligations fiscales. Le plus bel exemple est celui du droit de grâce. On ne le sait peut-être pas, mais il existe encore toujours. Il est possible de s’adresser au ministre des Finances pour demander d’être dispensé des amendes administratives infligées par le fisc. L’intention n’est pas de supprimer totalement cette possibilité, mais de confier ce droit à un organe administratif. À tout le moins, cette formule doit présenter l’avantage d’une évaluation impartiale de telles demandes.
Mais les choses ne se passent pas ainsi, ou trop peu souvent : à cet égard, il faut également évoquer la question du ruling. La commission du ruling a été reconstituée il y a quelques années : elle devait servir à assurer une forme de sécurité juridique aux contribuables en situation financière difficile. Vous pouviez exposer votre situation au fisc pour essayer de trouver un accord sur la manière dont vous deviez concrètement être imposé. Mais cela ne fonctionne pas bien : le cadre de cette procédure n’a pas été bien fixé, et la commission a souvent dû — sans disposer de grandes compétences — servir à légaliser des montages qui frôlaient la limite de ce que la loi permet. On affirme à présent qu’un cadre clair s’impose. Dommage que l’on ne soit pas allé plus loin. Manifestement, cette commission ne remplit pas la fonction qui aurait dû être la sienne. Il faut espérer que l’on profitera de la fixation d’un cadre juridique pour limiter son rôle à ce pour quoi elle doit effectivement servir. Mais soyons clairs : plus on arrivera à harmoniser et à clarifier la législation, et moins de telles commissions seront encore nécessaires ou utiles. En tout état de cause, le fait que l’on entend donner à la Cour des comptes la compétence de superviser les accords conclus semble à cet égard constituer un point positif.

International

Tout est lié : si l’on veut se conformer à ses obligations et œuvrer à l’ouverture fiscale, il faut remplir son devoir, qui dit que la Belgique, dans ses relations avec d’autres pays, doit échanger autant de données que possible. Il était grand temps : notre pays est sorti de justesse de la « liste grise » des paradis fiscaux de l’OCDE en juillet dernier, grâce à la signature de douze accords bilatéraux sur l’échange d’informations dans les domaines bancaire et fiscal. En s’engageant à procéder à des échanges de données, on reconnaît que la lutte contre les paradis fiscaux doit être poursuivie. Et heureusement, le SPF Finances est resté cohérent à ce sujet : une task force a été constituée en son sein afin de s’en occuper. Plusieurs mesures ont été adoptées en vertu desquelles les sommes qui proviennent de paradis fiscaux se trouvent quand même imposées en Belgique.
En guise de conclusion, on peut souligner la grande qualité du rapport de la commission d’enquête de la Chambre. Mais comment sera-t-il traduit dans la pratique ? La commission a pris les choses au sérieux : elle a demandé que le gouvernement fasse régulièrement rapport sur le suivi de ses recommandations et qu’un groupe de travail permanent traduise en textes lesdites recommandations. En outre, pratiquement chaque parti démocratique a souscrit à ces conclusions, ce qui constitue un signal important. Mais seul l’avenir dira si la crise économique, bancaire et financière conduira ce beau rapport à rester lettre morte, ou si la majorité s’attaquera enfin véritablement à ce monstre qu’est la fraude fiscale.
Le plus vaste racket international de tous les temps

Dans l’ouvrage « Mondialisation - Gagnants et perdants », Mike Lewis, responsable du Réseau international pour la justice fiscale (Tax Justice Network) livre une série de chiffres — ahurissants — sur la fraude fiscale internationale. Premier constat : selon l’OCDE, la part du commerce mondial qui transite par les paradis fiscaux dépasse les 50 %. Autrement dit, plus de la moitié des bénéfices des principales entreprises mondiales échappe à l’impôt, ou est soumise à une fiscalité très avantageuse. En ce qui concerne les fortunes personnelles placées dans les paradis fiscaux, le TJN les évalue à 11,5 mille milliards de dollars. Si l’on taxait le revenu de ces fortunes personnelles à un taux modéré de 30 %, TOUS les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) pourraient être financés. Si donc les plus fortunés du monde payaient simplement leurs impôts comme tout le monde, on pourrait : réduire l’extrême pauvreté et la faim, assurer l’éducation primaire pour tous, promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, réduire la mortalité infantile, améliorer la santé maternelle, combattre le VIH/sida, le paludisme et d’autres maladies, assurer un environnement durable... Il n’y a sans doute pas d’autres mots : en ne payant pas leurs impôts, les plus riches de la planète se livrent au plus vaste racket international de tous les temps. Mais heureusement, il paraît qu’il n’y a plus de paradis fiscaux... (CD)

(*) Conseiller au service d’études de la CSC. Une première version de ce texte est parue en néerlandais dans « De Gids op maatschappelijk gebied ».

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