C’était l’été passé, en France. J’étais en voiture avec un ami soucieux de préservation de l’environnement et de développement durable, malgré un faible pour les monovolumes. Nous devisions au fil d’une de ces nationales qui se traînent entre deux villages et trois radars de police, lorsque le ton monta. Mon ami s’indigna contre ces détritus qui jonchent les bas-côtés de la route et que personne ne songe à ramasser. Pourquoi, s’énervait-il, ne paie-t-on pas des chômeurs pour entretenir les routes? La question aurait pu sembler pleine de bon sens populaire, mais elle me mit mal à l’aise. Je fouillai mon esprit anesthésié par la route en quête de quelque contre argument percutant. Las... j’eus beau parler de concurrence déloyale aux cantonniers, évoquer le peu de perspectives que cela offrirait aux sans-emploi, rappeler les dérives du travail obligatoire, je prêchais dans le vide. D’autant plus que mon ami était lui-même sans emploi et ne voyait rien de dégradant à soigner la verte nature... Mais l’histoire ne s’est pas arrêtée au bord de cette route de France. Car le contre argument percutant, c’est cet été que je l’ai trouvé, dans un autre pays d’Europe. En Hongrie, précisément, où le Parlement a voté une loi qui réduit les allocations de chômage et qui oblige les chômeurs à effectuer des travaux d’intérêt général. S’ils refusent? Ils perdront leurs maigres allocations (280 euros maximum). Et si le lieu de travail se situe trop loin de leur domicile ? Ils seront logés, notamment dans des villes conteneurs surveillées par des policiers à la retraite. Ces mesures visent d’abord les Roms, particulièrement frappés par le chômage. Mais l’histoire ne dit pas, encore, si on leur précisera à l’entrée de ces camps que « le travail rend libre ».