1er janvier 2000 – 1er janvier 2010. Soufflons les dix bougies de cette rubrique vagabonde en reproduisant un vintage : le tout premier Quoique, il y a 10 ans déjà... « Êtes-vous certain de bien placer votre argent ? » La question, faussement naïve, me fait émerger d’un profond sommeil. La cruauté du radio-réveil provient du fait que si l’heure de sa mise en route est programmable, le contenu de ce qui vous réveillera ne l’est évidemment pas. Suis-je, donc, certain de bien placer mon argent ? Bien sûr que non, me dis-je, dans l’espoir de pouvoir me rendormir en paix. Hélas, ce n’est que le début. « Consultez Épargner et investir », poursuit la délicate page publicitaire. La suivante me fait franchement sursauter : « Optimisez vos investissements sur les Bourses asiatiques » ! Puis encore : « achetez et vendez vos actions par internet », lisez « l’information rentable ». Finalement, la « banque virtuelle » et les « plus-values concrètes » m’enlèvent définitivement le sommeil. Sous la douche, l’esprit encore embrumé, les questions m’assaillent : faut-il vraiment déverser de telles promesses de profit, de rentabilité, de plus-values, bref de fric, de flouze et de pognon pour donner l’envie de se lever au citoyen-épargnant-mais-spéculateur-qui-s’ignore ? Faut-il, dès potron-minet, attirer ce citoyen-encore-travailleur-mais-futur-rentier dans les chimères de la Bourse et de la finance, lui faire miroiter la luxuriance d’un compte en banque, la profusion d’un portefeuille pour lui donner le courage de sortir de son lit, de boire son café et de partir au boulot ? Pendant que les espèces continuent de sonner et trébucher à la radio, un vieux film de De Funès se rappelle à moi : « Il est l’or, Monsignor, il est l’or de se réveiller »…